Historique : |
Meuble d'apparat dérivé du coffre, muni de nombreux tiroirs pour le rangement d'objets précieux, ce genre de "cabinet à poser" semble être apparu tout d'abord en Espagne et en Italien, d'où il gagne, dans le courant du 16e siècle, toute l'Europe. Portatif grâce à ses poignées de métal, il peut être posé sur un support quelconque - table, coffre ou tréteaux - quand il est pourvu d'un abattant, il sert d'écritoire ; il peut également ouvrir par deux vantaux. A l'origine, meuble utilitaire, sobrement fabriqué dans un bois dur comme le chêne ou le hêtre, le poirier ou le cerisier, parfois clouté de cuir, il évolue à la fin du XVIème siècle vers une structure plus compliquée et une ornementation plus riche. La vogue des cabinets d'apparat va de pair avec le goût des grands seigneurs pour les objets rares ou curieux (médailles, camées, bijoux, émaux, ivoires, quelquefois coquillages), auxquels ils servent d'écrin précieux, leurs niches et tiroirs secrets pouvant dissimuler également des documents confidentiels.Le cabinet du musée appartient à un type de meuble de petites dimensions, facilement transportable, fermé par deux vantaux, décoré d'ébène et de fines plaquettes d'ivoire dessinées à l'encre noire. Bien que cette pièce de mobilier ait été souvent qualifiée de "lombarde", l'origine de l'iconographie du décor, lorsqu'elle a pu être retrouvée, montre en fait une inspiration de la gravure flamande des 16e et 17e siècles. Dans les toutes dernières années du 16e siècle, se fixent à Anvers les premiers "ébénistes" (au sens littéral du mot), qui créent cabinets et scribans en placage de bois précieux et exotiques, et les exportent vers toute l'Europe. Anvers, métropole marchande des Pays-Bas méridionaux, port spécialisé dans le négoce du luxe et des oeuvres d'art, avait su attirer ces artisans désireux de commercialiser un produit nouveau et de qualité, et qui bénéficiaient en outre du marché espagnol en pleine expansion. L'exemplaire du musée est caractéristique de cette fabrication anversoise. Les illustrateurs anversois avaient sans doute connaissance de "l'Iconologie" de Cesare Ripa, rééditée à Rome en 1603, augmentée de gravures qui peuvent avoir inspiré ces allégories. Un cabinet tout à fait semblable dans sa composition et son décor - mêmes paysages, mêmes ornements de fruits et de plumes, même type de personnages allégoriques dans une arcature - a été publié par Ria Fabri dans le catalogue de l'exposition "Meubles d'apparat des Pays-Bas méridionaux" (Bruxelles, 1989). Cette similitude, retrouvée également sur des meubles passés en vente publique, permet de penser que ces cabinets ont été produits en Flandre, sinon en série, du moins d'après un modèle et une somme iconographique très peu renouvelés d'une pièce à l'autre (J. du Pasquier)
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