Historique : |
Originaire de Montpellier, Bernard Délicieux, moine franciscain né en 1260, fut l'un des plus virulents opposants à l'Inquisition lors de la répression menée contre l'hérésie cathare de la fin du XIIe siècle au XIVe siècle. Cette oeuvre fait partie d'une série de toiles exécutées autour de la figure de ce personnage, et intervient comme une suite à deux autres tableaux : "La Délivrance des emmurés de Carcassonne" et "L'interrogatoire". Laurens devait conclure son cycle sur Bernard Délicieux par la représentation de sa défaite dans "Le Torturé" ou "Après la question". Laurens s'inspira, pour cette série de peintures, d'un texte de l'historien Bernard Hauréau, "Bernard Délicieux et l'Inquisition albigeoise", publié sous forme d'articles dans la "Revue des Deux-Mondes" en 1868 et repris sous forme de livre en 1877. Jean-Paul Laurens choisit de représenter ici la scène du jugement : au premier rang au centre, face à Bernard Délicieux, le grand inquisiteur est entouré de deux religieux ; derrière eux siègent les représentants de l'Eglise, cardinal et évêques. Le moine, vêtu de la bure franciscaine, lève un bras vengeur vers ceux qui l'accusent, dont les visages momifiés, réprobateurs ou indifférents, apparaissent l'incarnation même de la répression bornée qu'illustre, de manière explicite, l'attitude des deux moines aux visages dissimulés, alors que l'inquisiteur, revêtu d'hermine, paraît scandalisé par le propos du franciscain. Originaire du Languedoc, Laurens, attaché à ses racines provinciales, ne pouvait qu'être particulièrement intéressé par cet épisode dramatique de l'histoire de son pays. À cet intérêt s'ajoutait un anticléricalisme républicain, qui trouvait dans la lutte de Bernard Délicieux contre le fanatisme de l'Inquisition un support tout naturel à ses propres convictions.
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