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Identifié essentiellement grâce à ses portraits et ses scènes de Bretagne, Charles Cottet, originaire du Dauphiné, fut également un peintre voyageur qui découvrit Venise, l'Egypte ou encore l'Algérie et qui séjourna en Espagne au début du XXe siècle. Exécuté en 1904, ce pays Castillan, que l'on pourrait imaginer baigné de lumière, aux contrastes violents, est ici traité dans la vaine des ouvres de la Bande noire. Mouvement fugace créé autour de Charles Cottet, Lucien Simon ou René Ménard, La Bande noire a regroupé, à la croisée des XIXo et XXe siècles, quelques artistes partageant des valeurs aussi larges que l'amour de la Bretagne, la volonté solennelle et profonde d'évoquer les coutumes de sa population, mais aussi, dans une démarche plus idéologique, afficher une certaine distance avec l'impressionnisme. Privilégiant une palette assombrie, sans délaisser l'académisme, leurs ouvres, aux accents crépusculaires, gagnent en intensité. C'est dans cet esprit, vraisemblablement après l'orage, que Charles Cottet a réalisé cette toile. Dans une gamme chromatique dominée par les ocres, il révèle, par la variété de sa touche, toute sa virtuosité. En effet, au-dessus de l'aplat marron où l'artiste représente le Tage terreux, se dresse la falaise, traitée dans une quasi-abstraction que relèvent les quelques touches de vert évoquant les oliviers et les empâtements saumonés qui soulignent l'architecture de l'hacienda. La brosse large et rapide qui suggère ce ciel encore menaçant accentue l'atmosphère véhémente de l'ouvre. Dans cette ouvre, exécutée avec une extrême liberté, la fluidité de son geste et sa spontanéité d'exécution démontrent à la fois toute sa maîtrise de la matière et sa science du paysage. En enveloppant son ouvre d'un imperceptible mystère, Cottet parvient à donner une vision poétique et tourmentée à cet extrait de Castille. Zacharie Astruc fut un des tout premiers peintres à se rendre en Espagne. Dès 1864, il parcourt le pays, s'imprègne de la couleur locale et prépare même le séjour d'Edouard Manet en 1865. Cette aquarelle date du deuxième voyage de l'artiste en Espagne ( 1872 - 1873 ). Installé avec sa famille à Madrid, il se rend notamment à Tolède à la fin de l'année 1872, à la demande du Président Adolphe Thiers, pour réaliser une copie de la statue en bois polychrome de saint François conservée en la cathédrale. #Attiré par le pittoresque des scènes de rue, Zacharie Astruc décrit sur le vif, comme seule l'autorise la technique de l'aquarelle, un jeune infirme à l'attitude troublante. Cette attention au petit peuple, allusion directe au réalisme cru des peintres espagnols du Siècle d'Or, on songe au fameux Pied-bot de José de Ribera, traduit parfaitement la compassion que ressent l'artiste devant le spectacle de la misère humaine. Portant l'attirail traditionnel du mendiant, large croix en pendentif, bicorne et culotte bouffante à pompons, cet infirme, au habits rapiécés et clinquants, prend la pose. Toutefois, une sensation d'étrangeté se dégage de ce portrait. En équilibre sur ses deux grandes béquilles, ce mendiant, qui semble fardé comme un acteur du théâtre Nô, nous dévisage brutalement. Etonnamment, il se métamorphose en un monstre japonais difforme dont le cadrage audacieux et décentré n'est pas sans rappeler l'esthétique des estampes japonaises. L'influence du Japon perce également au travers de l'utilisation de couleurs franches ( rouges, verts et jaunes ) et illustre l'ascendant durable qu'exerça l'art de ce pays sur les artistes français.#On relèvera enfin l'importance accordée au traitement de la lumière et qui rejoint l'une des préoccupations majeures des peintres impressionnistes. Parmi les proches amis de Zacharie Astruc, on relève les noms de Frédéric Bazille et Claude Monet. Le pavage décoloré par l'intensité des rayons solaires symbolise parfaitement la complémentarité des recherches que partagent ces différents artistes. (DV. 15 ans 09/2008)
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