Historique : |
Alejo Fernández est le peintre le plus important au 16e siècle en Andalousie. D'origine germanique - on le mentionne " pintor alemán " - il oeuvre à Cordoue jusqu'en 1508. Séduit dans un premier temps par l'évocation des architectures renaissantes, il s'installe à Séville sur la demande du chapitre de la cathédrale. Le grand retable, encore en place, qu'il réalise pour le sanctuaire surprend par l'acuité psychologique des personnages, le souci du détail, la richesse des costumes ainsi que des intérieurs (Nativité de la Vierge, Présentation au Temple). Comme la plupart de ses collègues, il s'inspire de gravures italiennes ou flamandes dont Martin Schongauer. L'un de ses sujets de prédilection demeure l'Adoration des Mages où la Vierge apparaît telle une jeune mère à l'expression voilée de tristesse (Vierge à la rose, église Santa Ana de Séville) présentant le tragique destin de son enfant. L'une de ses plus célèbres compositions, la Vierge des Navigateurs, exécutée vers 1535 et conservée à l'Alcazar de Séville, reprend un thème du Moyen-Âge : la Vierge de Miséricorde. Le petit panneau du musée Goya peut être comparé de judicieuse manière à l'Adoration des Rois Mages du retable de la cathédrale de Séville. Dans ce dernier le décor est constitué de ruines à l'Antique alors que notre tableau représente l'intérieur, plus modeste, d'une étable. Exécuté selon toute vraisemblance pour un oratoire privé, ce panneau illustre bien le sens de la perspective, le souci très poussé du détail, ainsi que la recherche des effets lumineux subtils, en particulier dans le paysage lointain traité en clair-obscur au moyen de glacis. Les attitudes calmes, la composition triangulaire et oblique servent une mise en page inspirée des maniéristes nordiques. Notre regard tombe immanquablement sur la Vierge et l'Enfant Jésus que le rayon de l'étoile de la Nativité vient désigner. Le Roi Mage agenouillé au premier plan est très similaire à l'un des personnages de la Vierge des Navigateurs dans lequel on a voulu reconnaître Christophe Colomb qui prépare à Séville, en 1501, son quatrième et dernier voyage vers les Indes Occidentales. L'oeuvre est signée, chose relativement rare chez l'artiste, ce qui reflète l'évolution sociale des peintres au 15e siècle. Poésie, retenue et foi sincère sont les éléments marquants de cette très belle composition, la seule des collections françaises de la main d'Alejo Fernández. Extrait du cat. exp. Madrid/Bilbao, 2003, J. L. Augé
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