Historique : |
Cette peinture Nature morte aux violon, partition, mappemonde, tableau et fleurs est mentionnée dans une minute d'inventaire en date du mois d'avril 1960, écrite par Emile Magnien, conservateur du musée. A la même date, il en rédige deux autres concernant deux portraits de famille peints par Jeanne-Marie de La Balmondière (1750-1840), publiés par les musées de Mâcon dans le cahier d'inventaire n°2 (pp. 13 et 14). Ces portraits proviennent d'un legs de Geneviève Lambert d'Hernoux en 1944. Mais, aucune mention précise n'y est faite de cette nature morte. D'ailleurs, Emile Magnien écrit dans la minute à la ligne Auteur : " Melle de la Balmondière ? Douteux, en tout cas XVIIIème s. ". Jeanne-Marie de La Balmondière est issue d'une vieille famille de la bourgeoisie mâconnaise. Elle suit les cours de l'école de dessin de Mâcon puis de Dijon où elle est élève de Devosges, vers 1780. Elle épouse Antoine de Guat des Ilettes, apparenté à la légatrice citée précédemment. Dans les oeuvres entrées au musée par ce legs, il y a aussi deux copies faites par l'artiste ; l'une est celle de la Vierge au raisin de Pierre Mignard (1612-1695), copie visible dans le choeur de Saint Vincent de Mâcon et l'autre Saint Jérôme écrivant d'Abraham de Vries (1590-1650). L'original se trouve au couvent de la Visitation de Moulins depuis le déménagement des soeurs en 1995 de Mâcon à Moulins. Cette nature morte est restée longtemps dans une réserve de la Ville, humide et inadaptée. Dans le cadre de l'exposition de 2008, il a été " bichonné " par l'atelier lyonnais de restauration Aldo Peaucelle. L'allègement de poussière et de vernis a permis de découvrir dans la partie basse, sous les partitions, un nom et une date avec la mention " fait " -et non " fecit "-. Les personnes présentes lors de cette découverte, équipe muséale et restaurateurs, ont lu difficilement : Perrier et 1646. La toile et le châssis semblent anciens mais la comparaison stylistique et thématique avec les autres oeuvres des peintres Perrier, présentes dans les collections, ne permet pas de clarifier l'attribution à cette famille d'artistes travaillant à Mâcon et à Lyon avant 1656. (1). De plus, la présence sur la toile de deux fleurs peintes dans la partie droite, une pivoine et une tulipe noire, inconnues en France au 17e siècle, confortent ce refus. Une explication fiable de la présence de cette mention est difficile à énoncer. A ce stade des recherches, continuer l'enquête était une vraie tentation pour identifier l'auteur et la date de création. Nous avons commencé par étudier plus attentivement les différents éléments composant le tableau espérant y trouver des indications. Ainsi, la mappemonde et les cartes de la partie droite présentent des terres de l'Océanie: Les Nouvelles Philippines, Les Moluques, Les Iles de la Sonde et la Nouvelle-Guinée ou Terre des Papous. Leur découverte et leur dénomination pour les européens remontent toutes au 16ème siècle. Leur présence ici n'est donc pas déterminante. Ensuite, au fond de la composition, l'artiste a placé un médaillon sculpté représentant une tête d'homme couronnée de lauriers, de profil gauche. Chercher son identité nous a conduit, en raison des objets inscrits dans la nature morte, des grands navigateurs du 18ème siècle, James Cook et Louis Antoine de Bougainville, aux peintre et sculpteurs les plus crédibles : J-B. Greuze (le petit personnage peint présenté sur le chevalet étant dans sa manière), J-B. Pigalle, E. Falconet ou encore Claude Michel dit Clodion et J-A. Houdon, puis aux compositeurs avec un faible pour Joseph Haydn et terminer par l'empereur Constantin et le roi Louis XV. Ce dernier est représenté couronné des lauriers de la victoire, en médaillon par le sculpteur Paul-Louis Cyffle (1724-1806), sculpteur ordinaire du roi Stanislas de Pologne, beau-père du roi de France. La comparaison entre les deux portraits est prometteuse. L'oeuvre se trouve dans un musée de l'est de la France, Nancy ou Toul. Une vérification i n situ serait nécessaire. Mais, revenons à Haydn. Mademoiselle de La Balmondière a pu rencontrer à l'école de dessin de Mâcon, Pierre-Victor Olagnon (1786-1845) (2). En réserves des Ursulines, est conservé, du même auteur, un médaillon en grisaille représentant le musicien (3) qui pourrait ressembler à notre sujet. En restant dans la musique, l'instrument représenté n'a pu être identifié précisément. Cette lecture d'image ouvre donc des voies mais sans aboutir à une réponse unique. Si l'on privilégie la proposition 18e siècle, l'attribution à La Balmondière est la plus judicieuse. Un autre axe de recherche avait été proposé, avant 1994, par Jean-François Garmier, conservateur du musée. Si l'on tient compte des travaux déjà cités de Jeanne-Marie de La Balmondière, elle pourrait copier, à nouveau, un peintre connu. Ici, il s'agit d'une artiste de son temps, Anne Vallayer-Coster (1744-1818). Après avoir consulté la monographie de Marianne Roland Michel, il ne s'agit pas d'une copie directe mais d'un " à la manière de ". Des oeuvres comme Les attributs des arts, 1769 ou les Instruments de musique, 1770, tous deux au musée du Louvre, seraient comme une source possible d'inspiration pour le peintre mâconnais. Cette peinture reste révélatrice d'un aspect important du genre de la Nature Morte traitant de grandes compositions. Elles étaient déjà présentes au 17ème dans les écoles du Nord et on les retrouve au 18ème chez Chardin ou ses proches. (Nane Tissot) 1. cf. 100 peintures des collections, Musées de Mâcon, Mâcon, 1999, pp.18-21 2. cf. 100 peintures des collections, Musées de Mâcon, Mâcon, 1999, p.59 3. cf. Cahier d'inventaire N° 3, Messieurs, Musées de Mâcon, 1999, p.18 4. cf. catalogue raisonné, Alençon, 1970 et Anne Vallayer-Coster, peintre à la cour de Marie-Antoinette, catalogue d'exposition, Musée des Beaux-Arts de Marseille, 2003
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